petition

Monsieur le Président de la République,

Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale,

 

Les résultats des élèves français ne sont pas satisfaisants à l’entrée en sixième. C’est vrai. La France a un score en baisse dans les évaluations internationales. C’est vrai. Personne ne s’opposera à la nécessité de remédier à une telle situation. Reste à savoir de quelle façon procéder.

Le remède proposé par le Ministre de l’Éducation nationale est simple. Il suffit de changer les programmes de l’école en revenant à des programmes ressemblant étrangement à ceux des parents, grands-parents, voire même arrière-grands-parents des enfants d’aujourd’hui. Est-ce réellement la bonne solution ? Une courte analyse s’impose.

La société a fondamentalement changé au cours des deux dernières décennies : développement de la télévision, modifications fortes des comportements sociaux, changement du regard porté sur l’école, fort besoin en chercheurs dans tous les domaines, avènement d’Internet, développement du téléphone portable, SMS, « chat », courrier électronique, etc. Ces derniers points ont, c’est un exemple, modifié le rapport des jeunes à l’écrit, tant du point de vue de l’orthographe que de la grammaire et du vocabulaire. Les jeunes n’ont peut-être jamais tant écrit, ni aussi mal. Le statut de l’écrit revêt ainsi deux habits. Le premier sert à la communication entre jeunes, il est abondant, mais mal écrit, le deuxième sert aux communications plus traditionnelles, il est rarement utilisé par les élèves en dehors de l’école. Le rapport au calcul a été modifié d’une manière un peu analogue du fait de la généralisation des calculatrices. Que ne voit-on d’élèves, d’enfants, voire même de jeunes adultes sortir à tout bout de champ la calculatrice pour effectuer des opérations simples ?

L’école a le devoir de transmettre une culture, de permettre aux élèves de se construire comme adultes autonomes, équipés des outils intellectuels nécessaires à l’intégration dans une société moderne :

-         de manipuler les outils de communication,

-         de calculer mentalement pour contrôler ses instruments, pour trouver des liens entre des données,

-         d’analyser,

-         d’affronter un problème quel qu’il soit, problème rencontré à l’occasion d’une nécessité d’écrire en français, de communiquer en langue étrangère, problème technique, etc.,

-         de développer une attitude de recherche, une curiosité intellectuelle, etc.

On pourrait ajouter de nombreux autres points à la liste ci-dessus.

Ces considérations, et bien d’autres, ont conduit le Ministère de l’Éducation nationale de l’époque à mettre en œuvre, dès 2000, un processus d’élaboration de nouveaux programmes. Ce processus a conduit à la publication des « programmes de 2002 » qui se sont inscrits en rupture pédagogique par rapport à tous les programmes précédents. Ce changement de programmes en 2002 a été établi après une longue concertation transparente. Le Ministère avait consulté de nombreux spécialistes réputés pour leur compétence et dont la liste était accessible à tous ceux qui le souhaitaient. Ces programmes élaborés sous un Ministre dit « de gauche » (Jack Lang), ont été publiés sous un Ministre dit « de droite » (Luc Ferry). Ils ne sont donc pas le produit d’une lubie politique, mais correspondaient bien à un réel besoin à la fois de la nation et de chacun des élèves.

On pourrait dire qu’une des caractéristiques essentielles de ces programmes était de donner du sens aux notions abordées dans toutes les disciplines concernées. Qui ne s’est en effet jamais posé la question « à quoi ça sert ?» (telle notion de mathématiques, tel concept de grammaire…). Mais aussi « à quoi ça sert, l’école ? », « à quoi ça sert d’aller à l’école ? », sous entendu « on n’y apprend rien » et on s’y ennuie. C’est vrai, l’école fondée sur les programmes précédant ceux de 2002 n’était plus adaptée à notre société. Les questions ci-dessus se posaient donc avec acuité.

Ces programmes de 2002 n’ont jamais été évalués et d’ailleurs, comment le seraient-ils puisque d’une part aucun élève entrant en sixième ne les a suivis totalement, que d’autre part, les évaluations internationales comme PISA ne concernent que les élèves de quinze ans et que de ce fait aucun élève ayant suivi les programmes de 2002 n’a été évalué dans ce type d’évaluation.

Comment peut-on dès lors rejeter de tels programmes ?

Il est évident qu’un discours fondé sur des arguments simplistes évoquant un retour aux « bonnes vieilles méthodes », peut porter ses fruits puisque ceux qui liront de tels arguments ont peu ou prou réussi. Mais peut-on imaginer un seul instant qu’un retour à des programmes anciens fondés sur l’imitation du maître, ne laissant aucune place à la créativité de l’élève, ne donnant aucun sens aux notions abordées -d’ailleurs beaucoup plus abondantes que dans les programmes de 2002- dans lequel l’évaluation de l’élève est fondée sur sa capacité à restituer par cœur une connaissance, à imiter un comportement, etc. sera efficace ? Certainement pas. Il ne s’agit pas d’apprendre plus. Il est fondamental d’apprendre mieux.

En 2008, les élèves français ont besoin de donner du sens à leur vie, de vivre des expériences fortes autres que celles de la rue. L’école actuelle peut les leur fournir, elle en a les moyens, encore faut-il lui laisser le temps d’en faire la preuve. Mais ce ne sont pas les actuels projets de programmes qui le permettront. Le processus qui a conduit à leur rédaction n’est d’ailleurs pas transparent. Il est l’œuvre de personnes non identifiées.

Nous ne nous laisserons pas embarquer dans une aventure folle, celle du retour aux programmes des parents, des grands-parents, voire même des arrière-grands-parents, programmes adaptés à une autre époque, programmes qui ont conduit aux mauvais résultats scolaires constatés actuellement, programmes inadaptés à notre société actuelle.

Nous voulons donner aux programmes de 2002, écrits pour les professionnels de l’éducation que sont les instituteurs et professeurs des écoles, par des professionnels, le temps de vivre et de faire leurs preuves.

Nous voulons une école dans laquelle nos enfants s’épanouissent, dans laquelle nos enfants apprennent, une école qui permet à nos enfants de devenir des femmes et des hommes capables de vivre dans le monde moderne, dans la France du XXI° siècle, ce que votre projet de programmes ne permet pas.

Parents, grands-parents, arrière-grands-parents, tantes, oncles d’élèves… ou tout simplement citoyens, nous vous demandons, Monsieur le Président de la République, Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale, pour le bien des enfants, pour le bien des élèves, pour l’avenir de la France, de retirer au plus vite votre projet de nouveaux programmes et de revenir aux programmes de 2002.

Serge PETIT, un grand-père qui souhaite que ses petits-enfants s’épanouissent dans l’école de la République.

petition

 

Les soulignés ou les engraissés ont été ajoutés par le "webmaster".