La pertinence des programmes de 2002 et de la loi sur les cycles de
l’école primaire
Une
loi peu appliquée
La loi du 11 juillet 1989 a institué une école
primaire fonctionnant par cycles. Ces cycles, et toutes les écoles qui les
mettent réellement en œuvre peuvent le confirmer, sont un facteur de réussite
pour les élèves. Ils assurent en effet une continuité des apprentissages
laissant à chaque élève le temps d’assimilation nécessaire tout en permettant
aux élèves les plus vifs de progresser plus rapidement. Du point de vue de la
discipline, de l’éducation à la citoyenneté, le mélange dans un même groupe
classe d’élèves de trois âges différents permet également des ajustements de
comportements bénéfiques à l’ensemble. La loi mettant en œuvre ces cycles n’est
malheureusement que peu appliquée et les corps d’inspection ne font pas la
promotion de sa mise en œuvre. Cette loi qui pouvait contribuer à
l’amélioration de l’enseignement n’a pas été appliquée, mais elle n’est pas la
seule.
L’inertie d’un système comme l’Éducation nationale est
grande et inévitable. Ce n’est pas sur quelques mois ou quelques années qu’un
tel système peut évoluer, mais sur quelques décennies. Ce qui explique
peut-être que la loi précédemment évoquée ne soit pas encore appliquée.
Les
programmes de 2002 : des programmes récents
Les programmes de 2002, qui ont été élaborés par un
groupe clairement défini, transparent, de personnes hautement compétentes,
inscrivant leurs propositions dans la suite des très nombreuses recherches
effectuées en France et dans le monde tant en sciences de l’éducation que dans
les didactiques des différentes disciplines nécessitent de même du temps pour
être appliqués. Ce délais d’application effective est dans une large mesure la
conséquence de l’impossibilité de former en quelques années l’ensemble des
professeurs des écoles à la maîtrise de ces nouveaux programmes.
Des
programmes non évalués
Les arguments des détracteurs de ces programmes
reposent d’une part sur les mauvais résultats des élèves français à des évaluations
internationales, or les élèves qui ont participé à ces évaluations n’ont pas
été concernés par ces programmes, d’autre part sur les mauvais résultats (que
nous ne contestons pas) obtenus à l’évaluation à l’entrée en sixième en 2006 et
avant. Les élèves ayant produit ces résultats n’ont pas non plus suivi une
scolarité primaire entièrement fondée sur ces nouveaux programmes. Aucune
raison objective ne peut donc conduire à la remise en cause de ces programmes.
Nombreux sont d’ailleurs les enseignants des écoles qui n’ont pas encore mis en
œuvre ces programmes, sans pour autant que les différentes inspections ne les y
contraignent.
Les mauvais résultats constatés ne peuvent donc en
aucun cas être attribués à ces programmes qui sont pourtant rejetés. Ces
programmes, quand ils sont appliqués par les enseignants formés à cette fin,
produisent pourtant d’excellents résultats, y compris en calcul mental
(figurant explicitement dans ces programmes).
Des
programmes adaptés pour former à la recherche et à l’analyse
Notre pays a un grand besoin de chercheurs, de
chercheurs qui trouvent, de chercheurs créatifs. Les programmes de 2002 sont
des programmes qui, outre des connaissances disciplinaires fondamentales dans
toutes les matières, demandent de développer des compétences indispensables à
la recherche, à la créativité, à la formation de l’esprit d’analyse et à
l’esprit de synthèse. Ils développent une attitude scientifique dans toutes les
disciplines.
Il convient donc de laisser à ces programmes et à la
loi de 1989 le temps de convaincre de leur pertinence. Les échecs actuels de
l’école étant le fruit de programmes ou de pratiques enseignantes proches des
projets de programmes « soumis à consultation », ceux-ci ne
permettront d’atteindre aucun des objectifs scientifiques, culturels et
civiques dont la France a besoin.
Serge PETIT, Professeur de mathématiques, le 1e
mars 2008